Le nouvel article 1254 du Code civil vise à dissuader le calcul coût-avantage d'un acte illicite en raison du risque de sanction civile confiscatoire.
Ce texte donne
aux juges judiciaires et administratifs le droit de condamner toute personne,
physique ou morale, ayant manqué à des obligations légales ou
contractuelles afférentes à son activité professionnelle, à payer une sanction
civile substantielle, visant à minima à la priver du gain réalisé
grâce à l’acte illicite, et donc à punir et dissuader.
1. Qu’est-ce qu’une faute lucrative ?
- un "manquement aux obligations légales ou contractuelles afférentes à l’activité
professionnelle" (élément matériel)
- commis de manière "délibérée en vue d’obtenir
un gain ou une économie indue" (élément moral)
2. Dans quel cas cette faute est-elle sanctionnée ?
Il faut un dommage «
sériel », ce qui suppose :
- un
dommage et non pas un simple risque
- causé
à "plusieurs personnes placées dans une situation similaire" (pas de
sanction en cas de victime unique)
3. Quel est le montant et le bénéficiaire de la sanction ?
- le montant de la sanction est fixé par le juge, en fonction de la gravité de la
faute commise et du profit retiré
- son
montant maximal est plafonné :
o
au
double du profit réalisé en cas de faute par une personne physique
o
au
quintuple du montant du profit réalisé en cas de personne morale - le montant de la sanction est versé à un fonds consacré au financement des actions de groupe
4. Précisions procédurales :
- le
juge judiciaire peut condamner à payer cette sanction civile sur demande du
ministère public
- le
juge administratif le peut sur demande du gouvernement
- la
décision doit être motivée
- le
risque d’une condamnation à la sanction civile n’est pas assurable
- le
cumul avec des sanctions pénales et administratives est possible pour les mêmes
faits, mais
le montant global des amendes prononcées ne peut pas dépasser le maximum légal
le plus élevé (certains auteurs considèrent que ce plafond n’est pas applicable
si le montant de la sanction civile est inférieur ou égal au profit réalisé
grâce à la faute, car la sanction ne pourrait alors pas être qualifiée de
sanction répressive : elle pourrait dans ce cas être cumulée avec une amende pénale ou
administrative sans plafond.)
- la
victime a aussi droit d’obtenir réparation du préjudice subi par l’octroi de
dommages et intérêts
Ainsi, le texte vise à
dissuader toute personne à commettre sciemment un acte illicite sur la base
d’un calcul coût-avantage, en augmentant le risque encouru par celui d’avoir à
payer une amende civile substantielle (et pouvant être cumulée avec d’autres
sanctions, et avec des dommages et intérêts indemnitaires).
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L’équipe droit des
affaires
Grégory de Moulins Beaufort,
avocat associé
Benoit Pic, avocat collaborateur
Sammy Chahir, avocat
collaborateur
Léopold Hannequart